Seul État au monde à porter le nom d’une femme, l’île de Sainte Lucie est une ancienne colonie britannique, longtemps disputée par les Français, devenue indépendante en 1979. Malgré des volumes modestes, l’île compte parmi les producteurs historiques de la Caraïbe.

Distillerie de Sainte Lucie

Bien que cela fût différent par le passé, il ne reste aujourd’hui qu’une seule distillerie sur l’île : Saint Lucia Distillers. Visite guidée.

L’histoire de Saint Lucia Distillers débute en 1931 lorsque Denis Barnard construit une distillerie à Dennery, sur la côte Est. En 1972, dans une volonté de rationaliser la production sur Sainte Lucie, la famille Barnard s’associe avec la famille Geest qui est propriétaire de la seconde et dernière distillerie de l’île. La distillerie de Dennery est fermée et l’intégralité du matériel est transférée à Roseau Bay sur la côte Ouest, là où est basée la distillerie de la famille Geest.

Clin d’œil à cette association, le premier Rhum que les deux familles produisent porte le nom de Denros (contraction des localités « Dennery » et « Roseau Bay »). Il s’agit d’un Rhum blanc de mélasse affichant un taux d’alcool vertigineux de 80%vol ! Réservé au marché local, il est toujours vendu à ce jour.

À partir des années 2000 la distillerie de Sainte Lucie va connaître des temps troublés (notamment en raison de la crise financière de 2008) et changer de main à plusieurs reprises. En 2016, les choses se stabilisent enfin et l’entreprise martiniquaise GBH (Groupe Bernard Hayot, entre autre propriétaire des distilleries de Rhum Agricole JM et Clément) fait l’acquisition de Saint Lucia Distillers et y insuffle une nouvelle dynamique bienvenue.

 

Le maître-mot : polyvalence

Comme évoqué en introduction, la spécificité de Saint Lucia Distillers réside dans sa capacité à produire un large éventail de styles de Rhum. Pur jus de canne comme mélasse, multiples souches de levures pour les fermentations, 4 types d’alambics… Autant de paramètres sur lesquels joue la distillerie pour produire pas moins de 8 variétés de Rhums différentes. Un style composite qui réunit sur une même île tradition française et britannique.

Côté matière première, la distillerie, fidèle à la tradition britannique utilise de la mélasse dans 90% des cas. Provenant de toute la Caraïbe (République Dominicaine principalement), elle est Intérieur d'une distillerie de Rhumacheminée jusqu’aux réservoirs de la distillerie par un ingénieux système, quasi-unique dans le monde du Rhum. En effet, les navires restent au large et transfèrent la précieuse mélasse par le bais de pipelines sous-marins.

Les 10% restants sont constitués de pur jus de canne. Ces dernières sont cultivées en propre par Saint Lucia Distillers sur 6 hectares autour de la distillerie.

Parmi les 4 alambics, commençons les présentations par l’alambic Vendome. Pour ceux qui ont parcouru avec attention notre article « Comment fabrique-t-on le Rhum ? », vous aurez retenu qu’il existe une myriade d’alambics différents dont les alambics hybrides. Construit par les célèbres chaudronniers américains du même nom au Kentucky, l’alambic Vendome présent à la distillerie est donc un appareil de distillation à mi-chemin entre le pot still et la colonne. En lieu et place du chapiteau que l’on trouve traditionnellement sur un pot still se tient une petite colonne de distillation à 9 plateaux. Cette configuration inhabituelle produit un distillat charnu à l’arôme distinctif qui s’exprime pleinement dans la gamme Chairman’s Reserve.

Intérieur de la distillerie de Sainte LucieSaint Lucia Distillers dispose également de 2 alambics John Dore. Un nom mythique parmi les chaudronniers qui mérite que nous nous arrêtions dessus quelques instants. Fondée en 1830 à Dublin, John Dore & Co ne sont autres que les successeurs de Aenas Coffey lui-même. Si ce nom ne vous dit rien, sachez qu’il est tout simplement l’inventeur de la colonne à distiller ! John Dore & Co sont donc les dépositaires d’une des plus importantes révolutions dans l’histoire des spiritueux ! Pour l’anecdote, l’entreprise a été la première à exporter du matériel de distillation aux États-Unis en 1933 après presque 15 années de Prohibition. Les alambics John Dore sont des alambics traditionnels à double retort qui produisent un distillat lourd et puissant (de mélasse et de pur jus) qui entre dans l’assemblage des réputées Cuvées 1931.

Enfin, une double colonne Coffey (encore lui !) vient compléter le parc d’alambics de Saint Lucia Distillers. Distillat plus fin et plus léger, il compose l’âme de la gamme Admiral Rodney et lui confère son équilibre.

Fûts de la distillerie de Sainte Lucie

Le vieillissement du Rhum à Sainte Lucie

Pour la maturation de ses Rhums la distillerie fait principalement usage d’anciens fûts de Bourbon mais il n’est pas rare de croiser des finitions en ex-fûts de Porto ou de Whiskey Irlandais. La distillerie dispose de stocks suffisants pour alimenter ses différentes gammes. La majorité des Rhums en vieillissement est âgée entre 6 et 11 ans mais les plus vieux stocks affichent 19 ans d’âge. Saint Lucia Distillers ne cède que de façon exceptionnelle du Rhum aux embouteilleurs indépendants. En effet, sa notoriété grandissante demande à la distillerie de conserver ses stocks afin d’assurer la pérennité de ses multiples gammes.

Plusieurs photos de Sainte Lucie

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