Aujourd’hui, traversons l’Atlantique pour nous pencher sur LA distillerie américaine qui monte : Privateer !
Le Rhum et les États-Unis, une histoire méconnue
Dans le pays où le Bourbon règne en maître, produire du Rhum peut sembler être une idée saugrenue. Et pourtant ! Au XIXème siècle, les choses étaient bien différentes chez nos amis Yankees. À cette époque, le Rhum était Roi et le Bourbon, alors alcool de maïs grossier, ne connaissait que des débuts balbutiants et sa consommation restait circonscrite aux campagnes reculées du Grand Ouest. Il existait, principalement sur les côtes Est et Sud du Pays, pléthore de distilleries de Rhum. Ces dernières importaient la mélasse depuis les Caraïbes ou l’Amérique du Sud et écoulaient leur marchandise sur le marché local. C’est cet héritage que Privateer remet au goût du jour.
Mais cette hégémonie du Rhum connut une fin brutale avec l’entrée en vigueur de la Prohibition le 16 Janvier 1920. Une sobriété imposée à l’échelle du pays tout entier qui durera jusqu’en 1933. Cette traversée du désert mettra un terme à la domination du Rhum sur le territoire américain (au produit d’autres spiritueux, notamment le Bourbon et le Whiskey Irlandais) et les États-Unis resteront vierges de toute production locale de Rhum pendant presque 100 ans.
Une distillerie récente, avec les 2 pieds ancrés dans la tradition
Basée dans le comté d’Essex, Massachusetts en Nouvelle Angleterre sur la côte Nord-Est des États-Unis, la distillerie Privateer, a été fondée en 2011. Le terme de « Privateer » fait référence aux corsaires du XVIIIème siècle. Des « privés » qui, grâce à une Lettre de Marque, pratiquaient la piraterie de façon officielle pour le compte d’une nation. Fidèle à la tradition américaine, la distillerie Privateer produit des Rhums de mélasse de fermentation longue à basse température distillés 2 fois et embouteillés sans additif ni filtration.
Cette cuvée, dénommée Navy Yard (« Arsenal » en Anglais) est un Rhum de 4 ans d’âge minimum ayant vieilli en futs de chêne américain neufs. Embouteillé à 52%vol, ce Rhum est sans additif et n’a subi aucune filtration.
Privateer Rum – cuvée Navy Yard 4 ans
Apparence : Robe brillante et limpide, dorée avec des reflets cuivrés. Sur les parois du verre, le Rhum laisse apparaître des jambes longues et régulières, modérément grasses.
Nez : Velouté il évoque immédiatement une scierie avec des notes de bois fraîchement coupé, de résine et de sciure de bois encore chaude. Puis, se développe le moelleux d’une guimauve à la vanille avec des pointes de menthe poivrée, de noisettes grillées, de pain toasté et de biscuit au beurre. L’alcool est très bien intégré. C’est un nez agréable, tout en gourmandise, « très américain » qui n’est pas sans rappeler certains Bourbons ou Rye Whiskies.
Bouche : Droite et vive. La texture est plus légère et fluide que le nez ne laissait supposer. Les épices dominent sans partage la première partie de bouche. Puissantes, elle laissent presque une impression piquante sur la langue. Puis le beurre signe son retour et vient tapisser le palais de son onctuosité en milieu de bouche ; avant de laisser la place à des notes d’abricots accompagnés de romarin. La finale, d’une longueur moyenne, laisse s’exprimer le chêne toasté sur des notes grillées ainsi que de vanille.
Notre avis : C’est un joli tour de passe-passe que réussi ce Privateer Navy Yard 4 ans. En effet, à l’analyse du nez, nous étions en droit d’attendre un Rhum gras et un peu pataud. Mais la bouche s’est révélée être bien plus nerveuse et puissante que prévue. Les épices (clairement apportées par le chêne) confèrent au Rhum une énergie salutaire. En somme, une cuvée réussie qui s’écarte des classiques de la tradition britannique et qui plaira beaucoup aux amateurs de whiskies américains et qui laisser présager de belles choses pour la suite !
À découvrir !