Parce que le Rhum, son histoire et sa production sont des sujets complexes faisant appel à un jargon parfois obscur, La Maison des Rhums vous gratifie ici, petits veinards, d’un lexique qui, nous l’espérons, vous aidera à mieux naviguer sur les mers de la Planète Rhum ! Après sa lecture, plus jamais on ne vous prendra à être dépassé par une conversation de geeks du Rhum. Alors, on dit merci qui ?!
Alambic à repasse (« pot still »)
Appareil traditionnel de distillation et outil historique de la production de Rhum (et de tous les autres spiritueux). Il nécessite une double distillation, d’où son nom. Il est composé d’une cuve qui accueille le liquide à distiller et qui porte un nom fort cocasse : la cucurbite (avouez, vous avez ri aussi). Celle-ci est chauffée pour amener le liquide qu’elle contient à la température souhaitée. À son sommet, un tube au nom fort délicat : le col de cygne. Il a pour mission de rediriger les vapeurs distillées vers un condenseur qui a pour but… de condenser les vapeurs (merci Capitaine Évidence !) et ainsi les faire retourner à l’état liquide. Ce liquide se nomme le distillat. Pour plus d’informations, plongez-vous dans la lecture de notre article qui traite de la production du Rhum. Ce sera toujours moins risqué que de plonger directement dans un alambic…
Alambic à double retord (« double retort pot still »)
Modernisation de l’alambic à repasse qui fut inventée au 19ème siècle par l’ingénieur Français Jean-Édouard Adam. L’objectif ? Obtenir 2 fois plus de distillat en 2 fois moins de temps et en consommant 2 fois moins d’énergie qu’avec un alambic à repasse. « Sorcellerie ! » pourrait alors s’exclamer le lecteur peu avisé. « Que nenni ! » lui répondrons-nous. « Science, cher lecteur, rien que science ! » Le principe ? En sortie du col de cygne, les vapeurs distillées passent par 2 « chambres » en cuivre avant de rejoindre le condenseur. La première chambre est partiellement remplie de bas vin et la seconde de haut vin. Le résultat ? En passant dans ces 2 chambres, les vapeurs se chargent en arômes supplémentaires au contact des 2 liquides et du cuivre et nous offre un distillat plus riche en goût. Merveilleuse science !Antilles
Vaste archipel s’étirant en arc de cercle sur 4 500 kilomètres entre le Golfe du Mexique et les côtes du Venezuela. Elles tirent leur nom d’une île fantôme de l’Océan Atlantique, l’Île d’Antilla. Les vraies Antilles, elles, hébergent 42 millions d’habitants répartis entre 13 états indépendants et une multitude de dépendances territoriales de nations européennes, dont certains DOM-TOM en ce qui concerne la France. Les Antilles abritent des dizaines de distilleries de Rhum et sont souvent considérées, dans l’imaginaire collectif, comme son berceau. Elles sont aussi connues pour leurs paysages paradisiaques et leurs sublimes plages de sable blanc. À ce sujet, et toujours soucieux d’étoffer votre culture générale, sachez que ce fameux sable blanc est composé à 70% de… déjection de poissons-perroquets ! Véridique ! Pensez-y, la prochaine fois que vous enfoncerez avec délice vos orteils dans le sable chaud d’une plage de Martinique…
AOC Rhum Agricole de Martinique
Entrée en vigueur le 5 Novembre 1996 après de longues décennies de travail, elle encadre la production du Rhum à la Martinique. Dévoués comme nous sommes, nous avons déjà traité le sujet dans un article dédié. Vous y trouverez de quoi satisfaire votre curiosité !
Assemblage
Le terme désigne le fait de mélanger plusieurs fûts de Rhum avant de procéder à leur embouteillage. Ces fûts peuvent afficher un compte d’âge identique (à l’instar de cette cuvée signée Mezan) ou différents (comme ce Rhum JM VSOP) selon la volonté du Maître de Chai. Cette pratique, qui existe depuis que l’on met de la gnôle en bouteille, permet de garantir une régularité gustative dans le temps d’une même cuvée. C’est parce que l’on assemble des dizaines de fûts pour composer votre Rhum favori que ce dernier a toujours le même goût ! Il arrive même que des embouteilleurs indépendants assemblent des fûts d’origines différentes (les grands fous !) pour ne cesser d’esbaudir nos papilles.
Batch
En bon Français, « lot ». Pour des raisons marketing qui nous échappent, les producteurs de Rhums (et d’autres spiritueux aussi, l’absurdité ne connaît pas de frontières) préfèrent employer un barbarisme Anglais plutôt que d’employer le mot Français. Poussant encore un peu plus leurs errances linguistiques, les marques vont souvent accoler le terme « small » devant « batch » pour former l’expression « small batch ». Ou « petit lot », toujours en bon Français.
On emploie cette dénomination pour parler d’une cuvée en quantité limitée née de l’assemblage de quelques fûts. Récemment, c’est la distillerie de Martinique La Favorite qui s’en donne à cœur joie avec ce concept au travers de sa gamme Exploration.
Brut d’alambic ou brut de colonne
Se dit d’un Rhum Blanc embouteillé à son degré de sortie d’alambic ou de colonne sans passer par une étape de réduction. Ces cuvées affichent bien souvent des titrages d’alcool volumique (TAV) à défriser les moustaches (plus de 70%vol est monnaie courante). Elles sont pourtant animées d’un objectif tout à fait noble : la satisfaction toujours plus grande de vos papilles. Attendez de lire le paragraphe sur la réduction de ce lexique pour vous en convaincre.
Brut de fût
Se dit d’un Rhum passé en fût puis embouteillé à son degré naturel par opposition à un Rhum qui aurait été réduit. On parle aussi de force naturelle du fût. Les amateurs de barbarismes œuvrant pour la domination de la Perfide Albion préfèreront le terme de « Cask Strength », ça fait plus smart… Retrouvez tous les détails de ce sujet dans cet article de notre blog.
Cachaça
Eau-de-vie brésilienne produite à partir de la fermentation et distillation de pur jus de canne à sucre. Son existence est antérieure à celle du Rhum. Le nom « Cachaça » est protégé légalement et ne peut s’appliquer qu’à une « eau-de-vie de canne à sucre, typique et exclusivement produite au Brésil ». Selon les données de l’IBRAC (« Instituto Brasileiro da Cachaça »), il s’en produirait près 1,2 milliard de litres par an, répartis sur le marché en environ 1500 producteurs. Toujours selon l’IBRAC, ce serait le 3ème spiritueux le plus consommé au monde. Si les cyniques ne manquent jamais de souligner que la différence entre une Cachaça et un Rhum de pur jus de canne est ténue, le TAV en sortie de distillation marque la principale distinction entre ces 2 spiritueux. En effet, pour prétendre à ce nom, une Cachaça ne peut pas couler à plus de 48%vol.
Canne à sucre
Que ferions-nous sans elle ? Rien ! Et comme nous sommes du genre reconnaissant à La Maison Des Rhums, nous lui avons consacré un article rien que pour elle !
Chai
Entrepôt dans lequel le Rhum est mis en vieillissement. La personne en charge de superviser la maturation du Rhum dans les chais porte souvent le nom de maître de chai (c’est la classe !). Il n’est pas rare que le maître de chai soit en charge de créer les différentes cuvées qui composent la gamme d’une marque de Rhum.
Colonne de distillation
Idée brillante née du cerveau fécond d’un ingénieur Irlandais, Aenas Coffey. La colonne de distillation modernise drastiquement le processus de… distillation (il est appréciable de voir que vous suivez). Comment fonctionne un alambic à colonne ? Il s’agit d’un imposant tube vertical (mesurant parfois plusieurs dizaines de mètres de haut) à l’intérieur duquel sont disposés de façon étagée des plateaux en cuivre perforés. Pour faire simple, de la vapeur est introduite à la base de la colonne tandis que le « vin » est introduit en haut. Alors que ce dernier ruisselle vers le bas à travers les plateaux, la vapeur en remontant se charge de l’alcool et des arômes qu’il contient. En haut de colonne, les vapeurs sont captées et condensées. On peut la décomposer en 3 zones, du bas vers le haut : la zone d’épuisement, la zone de concentration et la zone de rectification. Plus on monte, plus les vapeurs sont épurées. En sortie de tête de la zone de rectification, on obtient un alcool virtuellement pur (96,4% pour être précis). Pur certes, mais gustativement parfaitement nul !
La grande force de cette méthode est qu’elle permet d’obtenir directement un Rhum titrant entre 70%vol et 96.4%vol en un seul passage. Autre avantage, contrairement à l’alambic traditionnel qui a une contenance définie (aussi importante soit-elle), la colonne peut continuellement produire tant qu’elle est alimentée en vapeur et en « vin ». Ce qui lui vaut le nom de distillation en continu. On peut ainsi produire plus rapidement de plus grandes quantités de Rhum. Que ne ferait-on pas pour gagner plus d’argent ?!
Créole
Si l’adjectif désigne de nombreux éléments de la culture caribéenne, intéressons-nous plus précisément à la colonne créole si vous n’y voyez pas d’inconvénient (notez que, au cas où vous en verriez, cela ne changerait strictement au contenu du paragraphe qui suit !). La colonne créole est l’appareil de distillation obligatoire pour tous les prétendants à l’AOC Rhum Agricole de Martinique. Elle se distingue d’une colonne de distillation classique par l’absence de zone de rectification. Cela permet donc de garantir un distillat gouteux et non un infâme alcool neutre tout juste bon à nettoyer les vitres !
Distillat
Liquide obtenu par refroidissement des vapeurs produites lors de la distillation. Donc si vous avez bien suivi, embouteillez un distillat et paf ! Vous obtenez un Rhum Blanc brut de colonne ou d’alambic.
Distillation
Processus qui vise à séparer les différents éléments contenus dans un liquide homogène sous l’effet de la chaleur. La vapeur obtenue est ensuite liquéfiée par refroidissement en passant dans un condenseur. Selon les régions du monde et les époques, l’Humain assoiffé de Rhum a employé, modernisé, inventé divers appareillages pour produire toujours plus de sa boisson favorite. Pour approfondir le sujet, voir plus haut, plus bas dans cet article ainsi qu’ailleurs sur notre blog.
Distillerie
Site où l’on pratique la distillation… qui l’eut cru ! La taille du dit-site étant proportionnelle à la soif de son propriétaire.
Esters
En chimie, la fonction ester désigne un groupement caractéristique formé d’un atome lié simultanément à un atome d’oxygène par une double liaison et à un groupement alkoxyle… Fascinant n’est-ce pas ?! Passé ce charabia cryptique, qu’est-ce que les esters viennent faire dans un lexique du Rhum ? Et bien figurez-vous que les esters sont des contributeurs majeurs au goût de votre boisson favorite. Ah, voilà qui est intéressant ! Ils naissent pendant la phase de fermentation lorsque des alcools supérieurs et des acides se combinent. Si vous vous sentez l’âme d’un chimiste nous ne pouvons que recommander la lecture d’un article rédigé par nos soins sur le présent blog ! Si l’on trouve donc des esters dans tous les Rhums (et bien d’autres spiritueux), la Jamaïque reste la reine incontestée en la matière. On y produit des Rhums bodybuildés et dopés aux esters qui se feront une joie de boxer votre palais à grand renfort de notes de solvants !
Fermentation
Il s’agit d’une phase absolument fondamentale dans la création du Rhum et de tous les spiritueux. Et soyons francs, cela ne nous arrange pas du tout ! En effet, si la distillation s’explique aisément et a depuis longtemps livré tous ses secrets aux maîtres distillateurs de la planète, il n’en est pas de même avec la fermentation. Il existe dans ce domaine de nombreuses parts d’ombre et de facettes inexplorées. Une définition sommaire nous explique qu’il s’agit d’un processus biochimique durant lequel des micro-organismes appelés levures se nourrissent du sucre et rejettent de l’éthanol. Pour nous autres amateurs de Rhum, il est important de retenir que c’est pendant cette phase de fermentation que naissent les arômes . Et que de nombreux paramètres vont influencer les susnommées naissances ! Durée, température, PH, type de levures, etc. Ces paramètres sont autant de manettes sur lesquelles le producteur va appuyer pour faire émerger ou inhiber certains arômes en fonction du résultat souhaité. Vous comprendrez donc aisément pourquoi nombre de distillateurs sont titulaires d’un doctorat en microbiologie… Ce qui n’est pas notre cas. Ne comptez donc pas sur nous pour faire les malins sur le sujet !
Foudre
Oubliez Zeus et la météorologie ! Le foudre est, à l’instar du fût, un contenant utilisé pour le vieillissement des boissons alcoolisées. Il se distingue du tonneau par sa taille imposante, le plus modeste des foudres ayant déjà une contenance équivalente à plusieurs fûts. Pour l’anecdote, sachez que le plus grand foudre du monde se situe en France dans les Pyrénées Orientales (cocorico !). Le bébé affiche une capacité légèrement supérieure au million de litres ! Excusez du peu…
Fût
Cette merveilleuse invention est souvent attribuée aux Gaulois. Cependant, il est probable qu’il fût (…) inventé dans le Nord-Est de l’Italie au 5ème siècle avant notre ère. Le fût est le récipient usuellement utilisé pour le vieillissement du Rhum. Pour des raisons d’échanges moléculaires entre le bois et le Rhum, il est presque systématiquement fabriqué en bois de chêne. Sa contenance va de quelques litres à plusieurs centaines selon l’intensité recherchée pendant le vieillissement. Plus le fût est petit plus il va conférer des notes boisées puissantes. Plus il imposant, moins il marquera de sa patte le Rhum qu’il héberge. Question de ratio entre taille du contenant et quantité du contenu, vous l’aviez compris, rusé comme vous l’êtes !
Hors d’Âge
Non il n’est pas question de ce pot de condiment oublié dans votre réfrigérateur depuis des lustres ! Le terme est utilisé dans les îles françaises pour désigner un Rhum vieilli pendant au moins… 6 ans. Vous êtes déçu(e)s ? Vous vous attendiez à un âge canonique de 10, 15, 20 ans ou plus ?! C’est partiellement compréhensible, mais cela serait bien compliqué au regard de l’impitoyable part des anges dont le Rhum souffre sous les Tropiques. Si vous ne comprenez pas de quoi nous parlons, rassurez-vous. Nous aborderons la question de la part des anges dans la seconde partie de ce lexique (insoutenable suspense !). En attendant, retenez que dans les Caraïbes, les anges picolent sec et que plus le temps passe, moins ils nous laissent de Rhum dans les fûts.
Mettons ici un terme à cette première partie de notre Lexique du Rhum. Nous vous donnons rendez-vous très bientôt pour la seconde moitié !